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Rovuma – Restaurant
Premier réveil au Mozambique après une nuit chaude mais calme et profonde.
Enfin une grasse matinée qui s’annonce tranquille.
Petit déjeuner tardif sur les coups de neuf heures, parfait, copieux, varié, si seulement les oeufs brouillés pouvaient être légèrement plus baveux et le bacon à l’anglaise, un véritable repas. L’immense salle de restaurant est assez agréable, n’étaient cette musique new age et ces sièges dans lesquels on est assis trop bas.
Le buffet offre tout ce que l’on peut désirer pour un véritable repas complet, de quoi se nourrir pour la journée.
Mais c’était sans compter les caprices de l’administration mozambicaine !
Il n’est pas dix heures que nous sommes appelés en urgence par la régie pour nous rendre au plus vite sur le lieu de stationnement des camions, à quelques pas de là, le long de la cathédrale Notre Dame de la Conception qui jouxte l’hôtel.
La douane qu’on espérait au mieux lundi, venait d’ouvrir les scellés, un soulagement pour la production qui pensait déjà devoir repousser le tournage d’un ou deux jours.
Du coup, la journée de samedi sera consacrée au déballage et à la préparation du matériel. Après tout, on est là pour ça !
Il est d’usage en France de regrouper matériel caméra et matériel son dans le même camion, le plus souvent un 22 m³, avec hayon, si on a de la chance, mais le véhicule se retrouve vite en surcharge, parfois mieux un 26 ou 30 m³ avec hayon (mais qui nécessitent alors un permis poids lourd).
L’idée de Joana, notre directrice de production portugaise, était donc de nous mettre dans le minibus de la TIM prévu pour l’image. Elle n’escomptait sûrement pas nous voir arriver avec deux roulantes, l’une de 70x70x140 cm, l’autre de 50x50x105 cm, et … une quinzaine de petites caisses, sans parler de celles que nous laisserions au bureau, quelques 400 kilos de matériel en tout.
Lever 4h45. Petit déj. 5h15, départ hôtel 5h40 !
La nuit a été un peu agitée, habituel à la veille d’un premier jour, même après plus de 100 films tournés.
L’hôtel a gentiment accepter d’ouvrir la salle de restaurant dès 5h00 du matin, pendant toute la période du tournage, avec un cuisinier, un chef de salle et un serveur. Cela nous permet de pouvoir profiter d’un véritable repas complet, un point capital vue l’amplitude de travail proche de 12h00, et un repas à la cantine pas avant 12-13h00.
Nous quittons l’hôtel à 5h40 pour être à 5h45 dans le camion caméra stationné en toute sécurité dans le parking privé du Centre Culturel. Bob est bien sûr à son poste, le moteur tourne.
La République des enfants – Configuration semi-portable
Retour pour toute la journée sur le décor de la mangrove de Costa do Sol. Les camions sont restés sur place, sauf bien-sûr le minibus caméra et le « van som ».
La marée basse est aujourd’hui 40 minutes plus tard que la veille mais nous commençons une demi-heure plus tôt, allez comprendre. De fait la journée, organisée en trois lieux, sera nettement plus longue.
Après avoir attendu un bon moment que le chef opérateur, l’assistante et le metteur en scène choisissent le premier endroit de la journée, nous commençons donc par aller ramasser avec les enfants quelques cailloux dans la mangrove que l’océan vient de libérer.
Nous avons pris la mesure de la journée d’hier, fini les roulantes, nous passons en configuration semi-portable :
Maputo – Malanga
Il y a des jours où rien ne va, ce matin je suis morose et ma journée se terminera en catastrophe. Il faut alors laisser le temps passer.
Pour la première fois depuis le début du tournage, nous prenons la direction de l’Ouest, Malanga, un quartier vers la sortie de la ville. C’est simple, depuis le Centre Culturel, c’est tout droit, de la place de l’Indépendance, il suffit de suivre Avenida Josina Machel. Seulement voilà, cette avenue plutôt étroite croise toutes les grandes avenues Nord-Sud de Maputo, et il ne faut pas se tromper dans le sens des priorités, quand on roule à gauche depuis seulement 4 jours, c’est éprouvant et dangereux. Le plan milésien c’est bien, quand il y a des feux.
Une des rares journées mixtes du plan de travail, enfin mixte (à cheval sur le jour et la nuit) c’est beaucoup dire, il est prévu de terminer (retour à l’hôtel) à 21h30. Comme le soleil se couche vers 17h10, il y a quasiment quatre heures de nuit effectives. A João ensuite de bien anticiper sa lumière de nuit pour en profiter au maximum. Je n’y crois pas trop, il y a tellement de chef op. qui attendent la nuit complète pour commencer à songer où placer les projecteurs.
Nous partons donc à 10h15. Enfin un peu plus tard, les assistantes caméra, Inês et Silene, qui accompagnent Bob, sont en retard, comme trop souvent. Je n’aime pas attendre. Je colle donc au minibus de Bob au plus près, à chaque croisement il faut se rappeler sans cesse : d’abord regarder à droite ensuite à gauche. A droite, à gauche, à droite, à gauche. Avec ma dyslexie naturelle, ça tourne en boucle dans ma tête. C’est mortel, heureusement Pierre est là pour veiller. Les fumées du minibus me rendent malade. J’ouvre la fenêtre pour un peu d’air, c’est pire. Je déteste le diésel. Nous arrivons sur le plateau, il faut encore palabrer avec Yardena pour pouvoir enfin stationner pour la journée. C’est pénible. On a à peine fini de sortir le matériel de la voiture, Pierre s’en va déjà sur le plateau avec la roulante, me laissant avec tout le reste à transporter. Ça m’énerve.
La République des enfants – A l’aube
Comme mardi dernier, nous voilà de retour en direction de Costa do Sol. Bob est parti un quart d’heure plus tôt, si bien que nous prenons la route seuls, le trajet est connu, Samora Machel, 25 de Setembro, Marginal le long de la côte.
Au début de celle-ci, il y deux endroits délicats pour qui n’est pas habitué à rouler à gauche, deux embranchements en fourchette, avec 4 directions imbriquées possibles, deux en sens inverses, deux dans le bon sens. Se tromper implique, dans le meilleur des cas de remonter vers le centre ville, dans les autres cas de se retrouver face à face avec d’autres véhicules. Heureusement, Pierre, veille et m’indique la bonne file.
Notez que les indications de sens de circulation sont faux sur Google Map, avec leur hégémonie western-centrique, ils ont oublié que le Mozambique roulait à gauche.
Pas d’itinéraire sur la feuille de service, Yardena nous a simplement indiqué que le décor est plus loin que la plage de la semaine dernière, il faut continuer la piste, une personne de la régie sera à l’entrée du premier village que nous allons croiser pour nous indiquer le chemin.
La République des enfants – Waldemar et Gerhard
Aujourd’hui nous allons en avoir plein les oreilles vue la quantité de poudre noire que Gerhard a mis hier dans les bourres.
Une grande journée d’effets spéciaux nous attend sur la piste de Chiango que nous prenons pour la dernière fois et qui mène au décor du champ de mines de la séquence 2 du film.
Mais auparavant, reprenons le fil de l’histoire où nous l’avions laissé hier.
Mon de Ferro, au mépris de tout danger, a remonté la colonne d’enfants, en dehors des marques, pour engueuler Fatima alors qu’elle donnait une banane à son bébé en pleurs.
C’est à ce moment là que Toni, en tête de colonne avec Tigre, annonce « Mine ! ». Mon de Ferro se précipite vers eux et leur ordonne d’avancer en les traitant de lâches puis s’en va courir au milieu des mines pour leur montrer à quel point il est invincible.
La République des enfants – Seul
Non, cet hôpital des riches n’est pas celui où nous tournons actuellement !
Il faut l’avouer, quand la régie s’occupe de vous, ça ne traine pas et je dois reconnaitre qu’ils ont été particulièrement efficaces, attentifs et dévoués !
La production a été mise au courant de mes ennuis de santé, fièvre, vertiges, ganglions à l’aine.
Je ne suis pas seul dans cet état sur le plateau, Angela, Patrick, Guilherme, Silene, il semble qu’un certain nombre d’entre-nous aient été piqués par des tiques, probablement dans le décor de la menuiserie, et que nous ayons possiblement contracté la maladie de Lyme.
Ce matin donc, à l’occasion d’un changement de plan, Yardena m’accompagne dans un bureau exigu muni d’une simple petite table et d’une chaise en métal rouillé, consulter un médecin de l’hôpital psychiatrique d’Infulene. Un premier test rapide de la malaria, on vous pique le doigt, on met la goutte de sang sur une plaquette qui réagit au bout de trente minutes, se révèle négatif. Tant mieux. Mais ce psychiatre m’avoue lui-même, par traduction interposée de Yardena, ne pas être spécialiste des soins et préfère m’envoyer consulter le service de santé de l’hôpital.
La République des enfants – Savane et USM 69
C’est ainsi que la feuille de service qualifie ce retour à Chiango.
Mais pour ma part, après huit jours de route EN1 et d’asile de fous, reprendre la piste de Chiango pour retourner sur le décor de la savane est un véritable plaisir.
Descendre Samora Machel, tourner à gauche sur 25 de Setembro, parcourir tout Marginal sur Costa do Sol, continuer tout droit pour prendre la piste, passer le village des pêcheurs puis le second hameau, nous voilà arrivés après la zone de tourbière et le petit canal.
À l’entrée du village des pêcheurs, un goulot d’étranglement ne laisse place qu’à un seul véhicule, le camion électro est bloqué là au milieu du chemin, enlisé profondément dans le sable.
Les bas-côtés sont totalement creusés, meubles, mais c’est la seule alternative possible. Un 4 x 4 y passe avant nous sans difficulté.
Je suis moins téméraire. Je fais marche arrière pour laisser la place aux véhicules qui arriveraient et nous réfléchissons à la meilleure façon de franchir cet obstacle avec notre Toyota Noah qui n’est pas tout terrain. Il faut prendre un maximum d’élan, foncer aussi vite que possible bien droit pour ne pas risquer de planter le train avant. Pierre descend pour écarter la foule déjà nombreuse à cette heure pourtant matinale.
La République des enfants – Flora
Nous n’allons pas très loin ce matin, au croisement de Rua do Bagamoyo et de Rua da Mesquita, dans le bas quartier portugais que nous avions visité plusieurs fois. Il est six heures trente.
À peine avons-nous tourné à droite en bas de Samora Machel pour s’engager sur 25 de Setembro que deux flics en costume blanc, donc de la circulation, nous arrêtent. Exactement là où nous nous étions faits alpaguer avec Antonio lors de notre première sortie à la plage.
Décidément il faut absolument éviter cette partie de l’avenue, voilà pourquoi Bob préfère effectuer un détour en passant plus bas le long du port.
Passeport, permis français non valable ici, c’est mal engagé, c’est soit mille meticais qui s’envolent, soit le poste.
La République des enfants – Enfants de Mafalala
Il aura fallu attendre six semaines avant que nous ne tournions dans ce qui caractérise l’agglomération de Maputo, ses immenses quartiers périphériques qui entourent la ville haute sur des kilomètres, le véritable habitat de la population pauvre de la capitale.
Mafalala est un de ces quartiers qui longent la route menant à l’aéroport.
Sans être à proprement parler des townships, ce mot évoque la ségrégation raciale en Afrique du Sud, ni vraiment des bidonvilles, ces quartiers sont extrêmement denses, l’habitat est un mélange de maisonnettes en dur et de baraques de bois et tôles ondulées.
Un habitat qui pourrait apparaître précaire donc mais dans lequel vit la majorité de la population de Maputo depuis des décennies.
Les rues de terre et de sable sont étroites, et si l’on n’a pas le sens de l’orientation, il est facile de se perdre dans des passages labyrinthiques.
Les voitures y sont rares, l’eau est le plus souvent tirée de pompes communes, le mode de vie est calqué sur celui des campagnes, avec la cour comme élément central autour de laquelle s’articulent la vie sociale et les occupations de la journée.
Maputo – Vive l’Indépendance Nationale
Je ne sais pas si c’est par défi, inconscience, aveuglement, irrespect ou mépris que la production portugaise a décidé de tourner le jour du 35ème Anniversaire de l’Indépendance Nationale de son ancienne colonie, le Mozambique.
Cette nuit fut celle qui précède la tempête car nous avons été prévenus qu’il y aura de la musique et des festivités jusqu’à l’aube de la suivante.
Officiellement, le son est convoqué ce matin à dix heures. La veille Angela nous a spécifié que les premiers plans seront muets car tournés sur la plage avec un quad, si bien qu’elle nous a gentiment accordé grasse matinée jusqu’à midi.
À neuf heures du matin, je suis appelé en urgence par Yardena car la voiture, toujours stationnée Rua da Radio alors que les camions sont déjà partis, doit quitter les lieux. Elle me conseille de la garer sur le parking du Rovuma et elle me laisse là à me débrouiller tout seul avec les milliers de flics qui bouclent le quartier.
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