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Lever 4h45. Petit déj. 5h15, départ hôtel 5h40 !
La nuit a été un peu agitée, habituel à la veille d’un premier jour, même après plus de 100 films tournés.
L’hôtel a gentiment accepter d’ouvrir la salle de restaurant dès 5h00 du matin, pendant toute la période du tournage, avec un cuisinier, un chef de salle et un serveur. Cela nous permet de pouvoir profiter d’un véritable repas complet, un point capital vue l’amplitude de travail proche de 12h00, et un repas à la cantine pas avant 12-13h00.
Nous quittons l’hôtel à 5h40 pour être à 5h45 dans le camion caméra stationné en toute sécurité dans le parking privé du Centre Culturel. Bob est bien sûr à son poste, le moteur tourne.
Quand les effets spéciaux débarquent sur un plateau, on imagine souvent que ce sera une journée tranquille pour le son ! Entre les ventilateurs, la fumée, l’agitation des techniciens SFX, il n’est guère possible de faire un son propre. Par ailleurs les mises en place sont interminables, la matinée risque d’être longue… et poussiéreuse.
Ce matin, tournage dans le parc du jardin botanique de Maputo, derrière le Centre Culturel, à 250 mètres de ma chambre d’hôtel. Il me faut néanmoins aller récupérer notre nouveau « Van Som » au parking du CCFM, et le descendre jusqu’à l’entrée du parc. Par prudence, je suis au plus près le « Van Imagem » de Bob, on ne sait jamais, même sur 100 mètres, un policier obtus est capable de vous créer les pires ennuis. Comme hier, long palabre avec la régie pour savoir où se garer. Il n’y a pourtant pas 36 000 emplacements ?
La République des enfants – Siège du Palais Présidentiel
Profitant du week-end, « La République des enfants » a envahi l’Hôtel de Ville de Maputo pendant 4 jours. Pour pouvoir bénéficier au maximum d’une ville calme et déserte, contrainte imposée par le scénario, la production a organisé la semaine du mardi au dimanche. Avoir le lundi comme jour de congé n’est d’ailleurs pas une mauvaise idée, les commerces sont ouverts, la ville animée.
Cette nuit, les véhicules de tournage, y compris le minibus caméra et notre véhicule, avec tous leurs matériels de valeur, sont restés devant le Palais, gardés par deux solides gaillards en treillis gris, fusil à pompe avec munition de chasse à l’éléphant engagée dans le canon. J’ai toujours une appréhension en passant à coté de ces gars, sympathiques au demeurant, qui donnent parfois un coup de main à porter des caisses, mais un coup de fusil est si vite parti !
Il nous faut pas plus de cinq minutes, vers 6h00 du matin, pour passer du petit déjeuner au lieu de tournage. Il fait encore frais à cette heure-ci, un peu d’humidité couvre les vitres.
Pour monter le matériel jusqu’au décor, les deux roulantes, les pieds et perches, le stéréo, la valise du kit-cool, Jorge et Suleimane, l’assistant personnel de Flora, tous deux guinéens, nous donnent un coup de mains.
De toute façon, nous avons le temps, car il faut d’abord éclairer le décor.
Maputo – Malanga
Il y a des jours où rien ne va, ce matin je suis morose et ma journée se terminera en catastrophe. Il faut alors laisser le temps passer.
Pour la première fois depuis le début du tournage, nous prenons la direction de l’Ouest, Malanga, un quartier vers la sortie de la ville. C’est simple, depuis le Centre Culturel, c’est tout droit, de la place de l’Indépendance, il suffit de suivre Avenida Josina Machel. Seulement voilà, cette avenue plutôt étroite croise toutes les grandes avenues Nord-Sud de Maputo, et il ne faut pas se tromper dans le sens des priorités, quand on roule à gauche depuis seulement 4 jours, c’est éprouvant et dangereux. Le plan milésien c’est bien, quand il y a des feux.
Une des rares journées mixtes du plan de travail, enfin mixte (à cheval sur le jour et la nuit) c’est beaucoup dire, il est prévu de terminer (retour à l’hôtel) à 21h30. Comme le soleil se couche vers 17h10, il y a quasiment quatre heures de nuit effectives. A João ensuite de bien anticiper sa lumière de nuit pour en profiter au maximum. Je n’y crois pas trop, il y a tellement de chef op. qui attendent la nuit complète pour commencer à songer où placer les projecteurs.
Nous partons donc à 10h15. Enfin un peu plus tard, les assistantes caméra, Inês et Silene, qui accompagnent Bob, sont en retard, comme trop souvent. Je n’aime pas attendre. Je colle donc au minibus de Bob au plus près, à chaque croisement il faut se rappeler sans cesse : d’abord regarder à droite ensuite à gauche. A droite, à gauche, à droite, à gauche. Avec ma dyslexie naturelle, ça tourne en boucle dans ma tête. C’est mortel, heureusement Pierre est là pour veiller. Les fumées du minibus me rendent malade. J’ouvre la fenêtre pour un peu d’air, c’est pire. Je déteste le diésel. Nous arrivons sur le plateau, il faut encore palabrer avec Yardena pour pouvoir enfin stationner pour la journée. C’est pénible. On a à peine fini de sortir le matériel de la voiture, Pierre s’en va déjà sur le plateau avec la roulante, me laissant avec tout le reste à transporter. Ça m’énerve.
Maputo – EN2
Ça va mieux, la nuit a été bénéfique, les bactéries sont parties.
Nous quittons le Centre Culturel vers huit heures, direction l’Ouest, pour le décor de l’entrepôt, un lieu important du film où les enfants de la République construisent les véhicules qui serviront à leur carnaval. Nous y irons plusieurs fois tout au long du tournage.
Nous passons en bas du bidon-ville d’hier, sur Avenida Organizaçao des Nacoes Unidas, au bout de Avenida 25 de Setembro. Bob, en fin connaisseur, fait un léger détour par le bas, le long du port, pour éviter les flics qu’il sait être souvent au début de 25 Septembre, et délaisse 24 Juillet toujours embouteillée.
Bien qu’en pleine heure de pointe, nous sommes assez rapidement sur le décor, quelques deux kilomètres plus loin que la veille.
Encore deux jours à tenir dans la menuiserie de la semaine dernière. Rien de réjouissant tant ce décor, situé le long d’une artère importante, dans une zone industrielle, est bruyant, poussiéreux, sale, moche et dangereux.
Départ comme d’habitude à 6h00, la route est connue puisque pour aller à Impaputo, la veille, nous sommes passés devant cet endroit situé au début de l’EN2 . Pas besoin donc de notre poisson pilote.
Alors que la production avait été relativement discrète sur le départ de Teresa, celle-ci, dans un petite note qu’elle a fait mettre à la feuille de service, remercie l’équipe pour sa gentillesse et la confiance qu’elle lui a accordée sur le plateau. Une dernière pensée tout à son image, une fille sympathique et charmante.
C’est sur ce décor maudit que Inês s’était blessée à la cheville, et si nous l’avons brièvement vue sur le plateau mercredi au stade de foot, elle n’était pas à Impaputo, il n’était pas raisonnable de reprendre le travail si tôt avec une telle blessure.
La République des enfants – Pierre et Rovuma
Il est bien agréable parfois de travailler à quelques pas de son domicile.
Le tournage a réinvesti la place de l’Indépendance, en particulier le grand escalier de l’Hôtel de Ville de Maputo et plus tard dans la journée les escaliers monumentaux de la place.
Le temps est assez frais ce matin, agréable après les grosses chaleurs que nous avions connues sur la piste de Chiango. Quelques nuages viennent même parfois masquer le soleil ce qui ne sera pas sans problème pour la lumière.
C’est le début du film, avant et après le Conseil des Ministres adultes.
Avant, c’est Nuta qui arrive au Palais pour y apporter les vêtements cousus pas sa grand-mère, là elle y rencontre Chico, le vendeur de mangues, que Nuta mène par le bout du nez.
Après c’est la débandade et la fuite des officiels du Palais, ainsi que celle de la population qui coure en tout sens sur la grand place.
Attention, ce chapitre contient des images susceptibles de heurter la sensibilité des plus jeunes, de nuire à l’épanouissement physique, mental ou moral des moins de 12 ans.
En conséquence, veuillez activer le contrôle parental de votre ordinateur.
Ça tombe bien, aujourd’hui nous avons tous les enfants du tournage, les soldats et les républicains, dont la petite Sarah, six ans, le jeune Bruno, à peine huit ans, Maurice, onze ans. Le spectacle qu’on leur impose est pour le moins choquant.
La République des enfants – Trois
Chez le dentiste, chez votre médecin ou même à l’hôpital, les salles d’attente sont des lieux où par nature on s’embête.
Heureusement, il y a toujours un journal qui traîne pour faire passer le temps, un Paris-Match, un Gala ou un Voici, ces journaux de voyeur qu’il ne vous viendrait jamais à l’idée d’acheter en temps ordinaire, ou mieux un Okapi voire un Journal de Mickey qui vous replonge dans votre tendre enfance.
Mais aujourd’hui, là, dans cette salle d’attente du bloc Acácias de l’hôpital psychiatrique de Infulene, banlieue de Maputo, Mozambique, il n’y a rien.
Mais alors rien qui puisse vous donner envie d’y rester, pas même un vieil exemplaire du Monde qui eût comblé de joie Pierre !
La nuit porte conseil.
Le dernier plan de la journée d’hier est à refaire, les quatre prises de la veille iront directement dans le Bin Trash de Final Cut Pro. Nous allons donc faire ce plan autrement, selon l’idée de Flora.
La République des enfants – Chapelle
Nous sommes dimanche, ça roule un peu mieux qu’en semaine.
Comme nous n’avons pas besoin de beaucoup de temps de préparation avant le PAT (prêt à tourner, heure officielle du début du tournage), nous sommes partis une demi heure plus tard.
Nous tournons à l’extérieur, à quelques pas de la route EN1, devant la chapelle de l’hôpital. Ce dimanche tout le quartier est donc là à chanter les louanges du Seigneur. Il avait été dit à la régie que cela devait se terminer vers huit heures, ils sont matinaux ici les offices, de fait cela finira vers dix heures.
Après la mise à sac de la pharmacie, Mon de Ferro est sur la terrasse d’un bâtiment d’où il s’amuse à jeter les boîtes de médicaments qu’il a pillées dans les armoires de celle-ci. Arrivent alors au pied de celui-ci Chico et Nuta. Cette dernière s’inquiète pour Toni et est dépitée d’assister au gâchis de tous ces médicaments si utiles à la République des Enfants.
La République des enfants – Flora
Nous n’allons pas très loin ce matin, au croisement de Rua do Bagamoyo et de Rua da Mesquita, dans le bas quartier portugais que nous avions visité plusieurs fois. Il est six heures trente.
À peine avons-nous tourné à droite en bas de Samora Machel pour s’engager sur 25 de Setembro que deux flics en costume blanc, donc de la circulation, nous arrêtent. Exactement là où nous nous étions faits alpaguer avec Antonio lors de notre première sortie à la plage.
Décidément il faut absolument éviter cette partie de l’avenue, voilà pourquoi Bob préfère effectuer un détour en passant plus bas le long du port.
Passeport, permis français non valable ici, c’est mal engagé, c’est soit mille meticais qui s’envolent, soit le poste.
La République des enfants – Enfants de Mafalala
Il aura fallu attendre six semaines avant que nous ne tournions dans ce qui caractérise l’agglomération de Maputo, ses immenses quartiers périphériques qui entourent la ville haute sur des kilomètres, le véritable habitat de la population pauvre de la capitale.
Mafalala est un de ces quartiers qui longent la route menant à l’aéroport.
Sans être à proprement parler des townships, ce mot évoque la ségrégation raciale en Afrique du Sud, ni vraiment des bidonvilles, ces quartiers sont extrêmement denses, l’habitat est un mélange de maisonnettes en dur et de baraques de bois et tôles ondulées.
Un habitat qui pourrait apparaître précaire donc mais dans lequel vit la majorité de la population de Maputo depuis des décennies.
Les rues de terre et de sable sont étroites, et si l’on n’a pas le sens de l’orientation, il est facile de se perdre dans des passages labyrinthiques.
Les voitures y sont rares, l’eau est le plus souvent tirée de pompes communes, le mode de vie est calqué sur celui des campagnes, avec la cour comme élément central autour de laquelle s’articulent la vie sociale et les occupations de la journée.
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