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Vert, il y manque le vert pour compléter les couleurs principales du drapeau mozambicain !
Une nuit pénible et nous voilà en onze heures de vol à Maputo.
La longue bâtisse de l’aéroport évoque le Sheremetievo moscovite des années 50, architecture fonctionnelle sans cachet, quelque peu usée par le temps. Le Mozambique, pays africain, est une ancienne colonie portugaise, à laquelle a succédé en 1975 un régime révolutionnaire communiste, longtemps soutenu par l’URSS puis la Russie.
Il est envahi de nos jours par les Chinois qui ont pris la place dans un grand élan de développement économique, pour preuve le nouvel aérogare flambant neuf en cours de finition, construit par une nuée d’ouvriers chinois tous en uniforme de travail d’un violet criard, à pied d’œuvre dès 7h00 du matin.
Lever 4h45. Petit déj. 5h15, départ hôtel 5h40 !
La nuit a été un peu agitée, habituel à la veille d’un premier jour, même après plus de 100 films tournés.
L’hôtel a gentiment accepter d’ouvrir la salle de restaurant dès 5h00 du matin, pendant toute la période du tournage, avec un cuisinier, un chef de salle et un serveur. Cela nous permet de pouvoir profiter d’un véritable repas complet, un point capital vue l’amplitude de travail proche de 12h00, et un repas à la cantine pas avant 12-13h00.
Nous quittons l’hôtel à 5h40 pour être à 5h45 dans le camion caméra stationné en toute sécurité dans le parking privé du Centre Culturel. Bob est bien sûr à son poste, le moteur tourne.
La République des enfants – Siège du Palais Présidentiel
Profitant du week-end, « La République des enfants » a envahi l’Hôtel de Ville de Maputo pendant 4 jours. Pour pouvoir bénéficier au maximum d’une ville calme et déserte, contrainte imposée par le scénario, la production a organisé la semaine du mardi au dimanche. Avoir le lundi comme jour de congé n’est d’ailleurs pas une mauvaise idée, les commerces sont ouverts, la ville animée.
Cette nuit, les véhicules de tournage, y compris le minibus caméra et notre véhicule, avec tous leurs matériels de valeur, sont restés devant le Palais, gardés par deux solides gaillards en treillis gris, fusil à pompe avec munition de chasse à l’éléphant engagée dans le canon. J’ai toujours une appréhension en passant à coté de ces gars, sympathiques au demeurant, qui donnent parfois un coup de main à porter des caisses, mais un coup de fusil est si vite parti !
Il nous faut pas plus de cinq minutes, vers 6h00 du matin, pour passer du petit déjeuner au lieu de tournage. Il fait encore frais à cette heure-ci, un peu d’humidité couvre les vitres.
Pour monter le matériel jusqu’au décor, les deux roulantes, les pieds et perches, le stéréo, la valise du kit-cool, Jorge et Suleimane, l’assistant personnel de Flora, tous deux guinéens, nous donnent un coup de mains.
De toute façon, nous avons le temps, car il faut d’abord éclairer le décor.
La République des enfants – A l’aube
Comme mardi dernier, nous voilà de retour en direction de Costa do Sol. Bob est parti un quart d’heure plus tôt, si bien que nous prenons la route seuls, le trajet est connu, Samora Machel, 25 de Setembro, Marginal le long de la côte.
Au début de celle-ci, il y deux endroits délicats pour qui n’est pas habitué à rouler à gauche, deux embranchements en fourchette, avec 4 directions imbriquées possibles, deux en sens inverses, deux dans le bon sens. Se tromper implique, dans le meilleur des cas de remonter vers le centre ville, dans les autres cas de se retrouver face à face avec d’autres véhicules. Heureusement, Pierre, veille et m’indique la bonne file.
Notez que les indications de sens de circulation sont faux sur Google Map, avec leur hégémonie western-centrique, ils ont oublié que le Mozambique roulait à gauche.
Pas d’itinéraire sur la feuille de service, Yardena nous a simplement indiqué que le décor est plus loin que la plage de la semaine dernière, il faut continuer la piste, une personne de la régie sera à l’entrée du premier village que nous allons croiser pour nous indiquer le chemin.
La République des enfants – Bruno
La Coupe du Monde en Afrique du Sud, le pays voisin et frère, ne commence que dans deux semaines mais nous, nous sommes déjà à l’entrainement. Et croyez-moi si vous le voulez, avec une équipe pareille, on a quelques chances de ne pas aller loin.
Le décor est à cinq minutes à pieds de l’hôtel, il nous en a fallu autant en voiture, et bien une demi-heure pour se garer ! Non pas que les places de stationnement manquent, mais la régie, Yardena, une fois de plus, a été particulièrement lente à décider de la place de chaque véhicule, ainsi avons-nous jouer pendant un bon moment aux chaises musicales dans la cour du Groupe Sportif de Maputo.
A six heures du matin, ça énerve un peu.
Le décor est en pleine ville, le terrain de handball, pour l’occasion on y jouera au foot, au sol bétonné, jouxte un immense dôme dans lequel en fin d’après-midi va se réunir un bon millier d’évangélistes pour chanter leur foi en en faisant profiter tout le quartier. Heureusement les réglages de la sono seront terminés quand nous allons commencer à tourner.
Mozambique – Aldeia Impaputo
Guidé par notre poisson-pilote Bob, nous quittons le CCFM à 6h00 pour une longue route, il est prévu 1h30 de trajet sur la feuille de service. Nous traversons toute la ville vers l’Ouest, empruntons l’EN2, passons un péage et bientôt nous nous retrouvons en pleine campagne.
Nous traversons prudemment Boane, une petite ville envahie par des centaines d’élèves, tous en uniforme bleu sombre à chemise blanche, qui rejoignent à pieds le lycée, puis nous bifurquons sur l’EN5, une route bordée par quelques carrières blanches, dans une contrée vallonnée au paysage arboré verdoyant. La route est en parfait état, le macadam granuleux, la signalisation à peine usée.
Nous arrivons finalement au village d’Impaputo en moins d’une heure.
Nous sommes sur le route qui mène à la frontière avec le Swaziland et l’Afrique du Sud, respectivement à 7 et 20 km à vol d’oiseau, 45 km par la route à l’Ouest de Maputo.
La République des enfants – Waldemar et Gerhard
Aujourd’hui nous allons en avoir plein les oreilles vue la quantité de poudre noire que Gerhard a mis hier dans les bourres.
Une grande journée d’effets spéciaux nous attend sur la piste de Chiango que nous prenons pour la dernière fois et qui mène au décor du champ de mines de la séquence 2 du film.
Mais auparavant, reprenons le fil de l’histoire où nous l’avions laissé hier.
Mon de Ferro, au mépris de tout danger, a remonté la colonne d’enfants, en dehors des marques, pour engueuler Fatima alors qu’elle donnait une banane à son bébé en pleurs.
C’est à ce moment là que Toni, en tête de colonne avec Tigre, annonce « Mine ! ». Mon de Ferro se précipite vers eux et leur ordonne d’avancer en les traitant de lâches puis s’en va courir au milieu des mines pour leur montrer à quel point il est invincible.
La République des enfants – Savane et USM 69
C’est ainsi que la feuille de service qualifie ce retour à Chiango.
Mais pour ma part, après huit jours de route EN1 et d’asile de fous, reprendre la piste de Chiango pour retourner sur le décor de la savane est un véritable plaisir.
Descendre Samora Machel, tourner à gauche sur 25 de Setembro, parcourir tout Marginal sur Costa do Sol, continuer tout droit pour prendre la piste, passer le village des pêcheurs puis le second hameau, nous voilà arrivés après la zone de tourbière et le petit canal.
À l’entrée du village des pêcheurs, un goulot d’étranglement ne laisse place qu’à un seul véhicule, le camion électro est bloqué là au milieu du chemin, enlisé profondément dans le sable.
Les bas-côtés sont totalement creusés, meubles, mais c’est la seule alternative possible. Un 4 x 4 y passe avant nous sans difficulté.
Je suis moins téméraire. Je fais marche arrière pour laisser la place aux véhicules qui arriveraient et nous réfléchissons à la meilleure façon de franchir cet obstacle avec notre Toyota Noah qui n’est pas tout terrain. Il faut prendre un maximum d’élan, foncer aussi vite que possible bien droit pour ne pas risquer de planter le train avant. Pierre descend pour écarter la foule déjà nombreuse à cette heure pourtant matinale.
La République des enfants – Flora
Nous n’allons pas très loin ce matin, au croisement de Rua do Bagamoyo et de Rua da Mesquita, dans le bas quartier portugais que nous avions visité plusieurs fois. Il est six heures trente.
À peine avons-nous tourné à droite en bas de Samora Machel pour s’engager sur 25 de Setembro que deux flics en costume blanc, donc de la circulation, nous arrêtent. Exactement là où nous nous étions faits alpaguer avec Antonio lors de notre première sortie à la plage.
Décidément il faut absolument éviter cette partie de l’avenue, voilà pourquoi Bob préfère effectuer un détour en passant plus bas le long du port.
Passeport, permis français non valable ici, c’est mal engagé, c’est soit mille meticais qui s’envolent, soit le poste.
La République des enfants – Flora, Pierre, João, Abigail
Dernier jour de tournage.
Après une bonne nuit de repos, enfin, nous nous retrouvons tous un peu après six heures du matin devant la caserne des pompiers de Maputo, sur Avenida Eduardo Mondlane, face au cimetière. Ce parking servira de base de départ pour les plans que nous avons à tourner sur la benne d’un camion de chantier.
Car dans la République des Enfants, il n’y a pas de voiture mais il y a deux camions ! Le rouge que nous avions vu lors du carnaval et qui servait de tribune, et ce bleu-là muni d’un haut parleur qui sert de véhicule d’alerte.
Ce second camion est une antiquité comparé à l’autre, la benne est en partie rouillée, il y a encore du sable dans les recoins, la carrosserie brinqueballe de tous côtés, le moteur est en piteux état avec une boîte de vitesses défectueuse qui ne dépasse pas la seconde.
Cela a son importance car nous avons à filmer sur cette benne un courte scène de texte.
La République des enfants – Sur la piste
Il fait nuit noire. La Lune nous a abandonnés. Il faut suivre le minibus caméra, il faut suivre notre poisson-pilote. Il ne faut surtout pas le lâcher, nous nous perdrions dans les townships.
D’abord regarder à droite, ensuite à gauche, à droite, à gauche. Quand on tourne à droite, il faut aller au fond du carrefour. À droite, au fond, à gauche, tout de suite. Ça tourne, moteur, action.
Nous suivons. La ville est déserte, abandonnée, Samora Machel dévastée est jonchée de débris, sur la place de l’Indépendance, quelques voitures fument encore, partout des fruits écrasés ont bariolé la grisaille du macadam.
Le vent balaye une poussière rouge que la faible lumière des lampadaires n’arrive pas à percer.
À gauche dans Jardim Tunduru, des huttes de paille brûlent les derniers grains de millet de la saison, la fumée tourbillonne dans la tempête qui rugit et apporte de loin le chant des enfants dans une classe d’école.
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