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Rovuma – Restaurant
Premier réveil au Mozambique après une nuit chaude mais calme et profonde.
Enfin une grasse matinée qui s’annonce tranquille.
Petit déjeuner tardif sur les coups de neuf heures, parfait, copieux, varié, si seulement les oeufs brouillés pouvaient être légèrement plus baveux et le bacon à l’anglaise, un véritable repas. L’immense salle de restaurant est assez agréable, n’étaient cette musique new age et ces sièges dans lesquels on est assis trop bas.
Le buffet offre tout ce que l’on peut désirer pour un véritable repas complet, de quoi se nourrir pour la journée.
Mais c’était sans compter les caprices de l’administration mozambicaine !
Il n’est pas dix heures que nous sommes appelés en urgence par la régie pour nous rendre au plus vite sur le lieu de stationnement des camions, à quelques pas de là, le long de la cathédrale Notre Dame de la Conception qui jouxte l’hôtel.
La douane qu’on espérait au mieux lundi, venait d’ouvrir les scellés, un soulagement pour la production qui pensait déjà devoir repousser le tournage d’un ou deux jours.
Du coup, la journée de samedi sera consacrée au déballage et à la préparation du matériel. Après tout, on est là pour ça !
Lever 4h45. Petit déj. 5h15, départ hôtel 5h40 !
La nuit a été un peu agitée, habituel à la veille d’un premier jour, même après plus de 100 films tournés.
L’hôtel a gentiment accepter d’ouvrir la salle de restaurant dès 5h00 du matin, pendant toute la période du tournage, avec un cuisinier, un chef de salle et un serveur. Cela nous permet de pouvoir profiter d’un véritable repas complet, un point capital vue l’amplitude de travail proche de 12h00, et un repas à la cantine pas avant 12-13h00.
Nous quittons l’hôtel à 5h40 pour être à 5h45 dans le camion caméra stationné en toute sécurité dans le parking privé du Centre Culturel. Bob est bien sûr à son poste, le moteur tourne.
Maputo – Malanga
Il y a des jours où rien ne va, ce matin je suis morose et ma journée se terminera en catastrophe. Il faut alors laisser le temps passer.
Pour la première fois depuis le début du tournage, nous prenons la direction de l’Ouest, Malanga, un quartier vers la sortie de la ville. C’est simple, depuis le Centre Culturel, c’est tout droit, de la place de l’Indépendance, il suffit de suivre Avenida Josina Machel. Seulement voilà, cette avenue plutôt étroite croise toutes les grandes avenues Nord-Sud de Maputo, et il ne faut pas se tromper dans le sens des priorités, quand on roule à gauche depuis seulement 4 jours, c’est éprouvant et dangereux. Le plan milésien c’est bien, quand il y a des feux.
Une des rares journées mixtes du plan de travail, enfin mixte (à cheval sur le jour et la nuit) c’est beaucoup dire, il est prévu de terminer (retour à l’hôtel) à 21h30. Comme le soleil se couche vers 17h10, il y a quasiment quatre heures de nuit effectives. A João ensuite de bien anticiper sa lumière de nuit pour en profiter au maximum. Je n’y crois pas trop, il y a tellement de chef op. qui attendent la nuit complète pour commencer à songer où placer les projecteurs.
Nous partons donc à 10h15. Enfin un peu plus tard, les assistantes caméra, Inês et Silene, qui accompagnent Bob, sont en retard, comme trop souvent. Je n’aime pas attendre. Je colle donc au minibus de Bob au plus près, à chaque croisement il faut se rappeler sans cesse : d’abord regarder à droite ensuite à gauche. A droite, à gauche, à droite, à gauche. Avec ma dyslexie naturelle, ça tourne en boucle dans ma tête. C’est mortel, heureusement Pierre est là pour veiller. Les fumées du minibus me rendent malade. J’ouvre la fenêtre pour un peu d’air, c’est pire. Je déteste le diésel. Nous arrivons sur le plateau, il faut encore palabrer avec Yardena pour pouvoir enfin stationner pour la journée. C’est pénible. On a à peine fini de sortir le matériel de la voiture, Pierre s’en va déjà sur le plateau avec la roulante, me laissant avec tout le reste à transporter. Ça m’énerve.
Maputo – EN2
Ça va mieux, la nuit a été bénéfique, les bactéries sont parties.
Nous quittons le Centre Culturel vers huit heures, direction l’Ouest, pour le décor de l’entrepôt, un lieu important du film où les enfants de la République construisent les véhicules qui serviront à leur carnaval. Nous y irons plusieurs fois tout au long du tournage.
Nous passons en bas du bidon-ville d’hier, sur Avenida Organizaçao des Nacoes Unidas, au bout de Avenida 25 de Setembro. Bob, en fin connaisseur, fait un léger détour par le bas, le long du port, pour éviter les flics qu’il sait être souvent au début de 25 Septembre, et délaisse 24 Juillet toujours embouteillée.
Bien qu’en pleine heure de pointe, nous sommes assez rapidement sur le décor, quelques deux kilomètres plus loin que la veille.
La République des enfants – Bruno
La Coupe du Monde en Afrique du Sud, le pays voisin et frère, ne commence que dans deux semaines mais nous, nous sommes déjà à l’entrainement. Et croyez-moi si vous le voulez, avec une équipe pareille, on a quelques chances de ne pas aller loin.
Le décor est à cinq minutes à pieds de l’hôtel, il nous en a fallu autant en voiture, et bien une demi-heure pour se garer ! Non pas que les places de stationnement manquent, mais la régie, Yardena, une fois de plus, a été particulièrement lente à décider de la place de chaque véhicule, ainsi avons-nous jouer pendant un bon moment aux chaises musicales dans la cour du Groupe Sportif de Maputo.
A six heures du matin, ça énerve un peu.
Le décor est en pleine ville, le terrain de handball, pour l’occasion on y jouera au foot, au sol bétonné, jouxte un immense dôme dans lequel en fin d’après-midi va se réunir un bon millier d’évangélistes pour chanter leur foi en en faisant profiter tout le quartier. Heureusement les réglages de la sono seront terminés quand nous allons commencer à tourner.
Encore deux jours à tenir dans la menuiserie de la semaine dernière. Rien de réjouissant tant ce décor, situé le long d’une artère importante, dans une zone industrielle, est bruyant, poussiéreux, sale, moche et dangereux.
Départ comme d’habitude à 6h00, la route est connue puisque pour aller à Impaputo, la veille, nous sommes passés devant cet endroit situé au début de l’EN2 . Pas besoin donc de notre poisson pilote.
Alors que la production avait été relativement discrète sur le départ de Teresa, celle-ci, dans un petite note qu’elle a fait mettre à la feuille de service, remercie l’équipe pour sa gentillesse et la confiance qu’elle lui a accordée sur le plateau. Une dernière pensée tout à son image, une fille sympathique et charmante.
C’est sur ce décor maudit que Inês s’était blessée à la cheville, et si nous l’avons brièvement vue sur le plateau mercredi au stade de foot, elle n’était pas à Impaputo, il n’était pas raisonnable de reprendre le travail si tôt avec une telle blessure.
Infulene – Dépôt de munitions
Du haut de la passerelle qui enjambe la route EN1 face à l’hôpital où nous tournons, on aperçoit au loin une immense zone arborée non construite et totalement enclavée dans les townships.
Vue du ciel, celle-ci est encore plus mystérieuse, on y distingue des traces qui évoquent les géoglyphes de l’antique civilisation Nazca au Pérou.
C’est en fait un terrain militaire totalement bouclé et sécurisé, un ancien dépôt d’armes et munitions construit par les soviétiques en 1984 à l’époque de la guerre civile qui ensanglanta le pays de 1977 à 1992.
Le 22 mars 2007, l’ensemble du dépôt explose.
Pendant quasiment trois heures, les munitions, roquettes, bombes et armes de toutes natures illuminent le ciel de Maputo, réchauffant l’atmosphère à des kilomètres à la ronde, causant une centaine de morts et plusieurs centaines de blessés.
La République des enfants – Savane et USM 69
C’est ainsi que la feuille de service qualifie ce retour à Chiango.
Mais pour ma part, après huit jours de route EN1 et d’asile de fous, reprendre la piste de Chiango pour retourner sur le décor de la savane est un véritable plaisir.
Descendre Samora Machel, tourner à gauche sur 25 de Setembro, parcourir tout Marginal sur Costa do Sol, continuer tout droit pour prendre la piste, passer le village des pêcheurs puis le second hameau, nous voilà arrivés après la zone de tourbière et le petit canal.
À l’entrée du village des pêcheurs, un goulot d’étranglement ne laisse place qu’à un seul véhicule, le camion électro est bloqué là au milieu du chemin, enlisé profondément dans le sable.
Les bas-côtés sont totalement creusés, meubles, mais c’est la seule alternative possible. Un 4 x 4 y passe avant nous sans difficulté.
Je suis moins téméraire. Je fais marche arrière pour laisser la place aux véhicules qui arriveraient et nous réfléchissons à la meilleure façon de franchir cet obstacle avec notre Toyota Noah qui n’est pas tout terrain. Il faut prendre un maximum d’élan, foncer aussi vite que possible bien droit pour ne pas risquer de planter le train avant. Pierre descend pour écarter la foule déjà nombreuse à cette heure pourtant matinale.
La République des enfants – Flora
Nous n’allons pas très loin ce matin, au croisement de Rua do Bagamoyo et de Rua da Mesquita, dans le bas quartier portugais que nous avions visité plusieurs fois. Il est six heures trente.
À peine avons-nous tourné à droite en bas de Samora Machel pour s’engager sur 25 de Setembro que deux flics en costume blanc, donc de la circulation, nous arrêtent. Exactement là où nous nous étions faits alpaguer avec Antonio lors de notre première sortie à la plage.
Décidément il faut absolument éviter cette partie de l’avenue, voilà pourquoi Bob préfère effectuer un détour en passant plus bas le long du port.
Passeport, permis français non valable ici, c’est mal engagé, c’est soit mille meticais qui s’envolent, soit le poste.
La République des enfants – Flora, Pierre, João, Abigail
Dernier jour de tournage.
Après une bonne nuit de repos, enfin, nous nous retrouvons tous un peu après six heures du matin devant la caserne des pompiers de Maputo, sur Avenida Eduardo Mondlane, face au cimetière. Ce parking servira de base de départ pour les plans que nous avons à tourner sur la benne d’un camion de chantier.
Car dans la République des Enfants, il n’y a pas de voiture mais il y a deux camions ! Le rouge que nous avions vu lors du carnaval et qui servait de tribune, et ce bleu-là muni d’un haut parleur qui sert de véhicule d’alerte.
Ce second camion est une antiquité comparé à l’autre, la benne est en partie rouillée, il y a encore du sable dans les recoins, la carrosserie brinqueballe de tous côtés, le moteur est en piteux état avec une boîte de vitesses défectueuse qui ne dépasse pas la seconde.
Cela a son importance car nous avons à filmer sur cette benne un courte scène de texte.
Ce dernier lundi à Maputo est consacré au rangement du matériel. Les camions doivent en effet reprendre la route de l’Afrique du Sud dès demain matin.
L’équipe image, caméra, électricité, machinerie, que nous n’avions pas vue hier à la fête de fin de tournage, João, Silene, Inês, Manuel, Paulo, s’occupe de son matériel avec ses assistants mozambicains sur les trottoirs de la cathédrale, là où les camions se sont garés pour la nuit.
Pour notre part, bien que la production n’ait plus ses bureaux au Centre Culturel, nous profitons une dernière fois de la cour privée du CCFM dans laquelle nous avions laissé, pendant toute la durée du tournage, nos deux malles Zargal en aluminium et nos cinq cantines Pierre Henry en fer.
Avec les quelques pluies tropicales qu’elles ont essuyées, la rouille a commencé à attaquer les plus vieilles. Un peu d’eau au fond de certaines me fait regretter de ne pas avoir jeté sur la pile des malles une bâche qui les eût protégées quelque peu.
La République des enfants – Sur la piste
Il fait nuit noire. La Lune nous a abandonnés. Il faut suivre le minibus caméra, il faut suivre notre poisson-pilote. Il ne faut surtout pas le lâcher, nous nous perdrions dans les townships.
D’abord regarder à droite, ensuite à gauche, à droite, à gauche. Quand on tourne à droite, il faut aller au fond du carrefour. À droite, au fond, à gauche, tout de suite. Ça tourne, moteur, action.
Nous suivons. La ville est déserte, abandonnée, Samora Machel dévastée est jonchée de débris, sur la place de l’Indépendance, quelques voitures fument encore, partout des fruits écrasés ont bariolé la grisaille du macadam.
Le vent balaye une poussière rouge que la faible lumière des lampadaires n’arrive pas à percer.
À gauche dans Jardim Tunduru, des huttes de paille brûlent les derniers grains de millet de la saison, la fumée tourbillonne dans la tempête qui rugit et apporte de loin le chant des enfants dans une classe d’école.
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