Maputo - Lune hivernale

La semaine passée a été terrible, la maladie et l’ambiance du plateau ont eu raison de ma forme physique et mentale, je suis épuisé, las et guère enclin à bouger.

Aussi ce lundi, après un copieux petit-déjeuner le plus tard possible, je décide de passer la journée complète au repos dans la chambre, n’était-ce un rendez-vous en fin d’après-midi.

Une brève visite en fin de matinée à la supérette sur 24 de Julho pour faire le plein de Yop et de Fanta, quelques tablettes de Crunch, et je me replonge dans les Splendeurs et misères des courtisanes.

Plus tard dans la soirée, vers dix-huit heures j’ai rendez-vous avec Charles, l’assistant monteur de Dominique, un jeune mozambicain féru de nouvelles technologie, réalisateur à ses heures de films institutionnels. Pour Dominique, c’est lui qui se charge entre autres de la synchronisation des rushes et de toutes les manipulations informatiques. Je lui avais promis un cours sur le Cantar, enregistreur son qu’il ne connaissait pas, et le workflow de post-production qu’il vaut mieux suivre pour ne pas faire d’erreur pour la suite des opérations.

Nous avions en fait déjà rendez-vous il y a trois lundis de ça mais, à cette époque, il avait dû aller jusqu’en Afrique du Sud pour acheter les disques durs que la production n’avait pas su lui fournir. Le lundi suivant j’étais malade, celui d’après, il n’était pas disponible, c’est donc quasiment à la fin du tournage que je lui présente ce petit exposé qui durera deux heures.

Bien que je doute qu’il y ait d’autres Cantar dans la région, le plus proche à ma connaissance étant sur l’île de la Réunion, je ne pense pas qu’il y en ait en Afrique du Sud, il ne me semble pas inutile de lui expliquer les principes et intérêts de cet enregistreur d’exception, lui faire une démonstration des fonctionnalité de Majax, l’indispensable logiciel qui permet d’en traiter et organiser les sons, de lui montrer les différents documents réalisés par Aaton qui décrivent les principes majeurs et les cas particuliers pour toutes les situations de post-production possibles.

Nous n’avons pas de locaux pour cela, en effet, après avoir monté le film dans une petite salle des anciens bureaux de la production au Centre Culturel, Dominique et Charles se sont vus attribuer une salle de cours de français normalement inoccupée. Normalement, car il se trouve que certaines fins d’après midi, et c’est la cas ce soir, Dominique voit sa salle de montage envahie par les élèves et le professeur de français, allez monter un film dans ces conditions, sans parler du fait que n’importe qui a accès en toute insécurité aux masters image et son du film !

Je suis effaré du peu de respect que la production fait du métier de ses techniciens, par l’esprit bricolage de tout cela, les écrans minuscules sur lesquels Dominique aura du mal à saisir les véritables dimensions de l’image, les écoutes ridicules sur lesquelles les fonds sonores sont totalement inaudibles. J’ose espérer qu’une fois rentrée en France ou à Lisbonne, Dominique bénéficiera d’une véritable salle de montage.

Bref après avoir cherché en vain une salle libre au Centre Culturel puis à l’hôtel, nous nous retrouvons dans le salon de la suite de Pierre, profitant de l’absence de celui-ci parti dîner.

En effet, Yardena a organisé un repas d’adieu pour Guilherme, touchante attention d’autant plus que c’est elle-même qui se charge de la cuisine ! Rendez-vous est pris au petit Mercado do Povo (marché du peuple) derrière l’Hôtel de Ville sur Avenida Ho Chi Min.

Maputo - Ho Chi Min

Le départ de Guilherme annonce la fin du film, c’est une des personnes majeures du plateau qui s’en va, une personne que nous allons regretter. Qui prendra sa place pour la direction d’acteur, alors qu’il reste un nombre de scènes important où le jeu des enfants sera primordial ? La réponse dès demain pour la fin de cette séquence pivot du film.

Demain il nous faudra encore reprendre la route EN1, cette journée de repos, coincée entre deux jours de tournage dans le même décor déprimant de Infulene n’en est pas vraiment une.

C’en est tellement renversant qu’ils ont accroché la Lune à l’envers ce soir !